Présentation de la direction Anthropologie, Éthique et Sciences de la vie

« Anthropologie, Éthique et Sciences de la vie » dans le cadre du Centre Orthodoxe d’Étude et de Recherche Dumitru Staniloae

Préambule

L’actualité montre une forte montée en puissance des dérives transgressives relatives à la programmation de la mort des embryons aux motifs compassionnels habituels cachant de fait une permissivité en cascade de plus en plus au service d’une recherche qui ne peut plus se dire innocente. Comme le remarquait le Professeur J. Testard, un des pères du premier bébé-éprouvette français (1982), « chaque pas, plus permissif que le précédent, est logiquement argumenté »[1]. C’est aussi ce que remarque le rapporteur de la révision des lois bioéthiques : « à chaque révision, le questionnement n’est pas de savoir sur quels fondements de valeurs la réflexion doit porter, mais quelles nouvelles avancées technologiques vont être autorisées […] Il est possible que, de petites renoncements en petites concessions, nous aboutissions un jour à un reniement de nos valeurs sur des pressions médiatiques successives au nom de la modernité »[2].  Devant cet état de fait et dans un contexte européen allant chaque jour vers des solutions eugénistes, touchant l’intégrité de l’homme depuis sa fécondation à sa mort et en particulier à ces deux extrêmes de la vie terrestre où la personne doit être le plus protégée du fait de sa plus grande fragilité, l’Orthodoxie se doit de réagir.

En dehors des colloques de l’Association Orthodoxe d’Études Bioéthiques, rien de formalisé n’existe en France, du moins à ce jour et à notre connaissance dans le monde orthodoxe pour mieux préparer nos clercs et les tenir informés des nouveautés dont les fidèles sont matraqués par les media. Si l’Église catholique possède des structures lui permettant de parler des questions bioéthiques au nom des chrétiens, nous considérons qu’il y suffisamment de divergences sur certains problèmes tels que la FIV[3] par exemple, et de sensibilité différente, voire de vision anthropologique distincte[4], pour que l’Église orthodoxe fasse entendre sa voix.

Objectifs 

Apporter aux clercs et aux laïques concernés par les questions pastorales, de guidance spirituelle, de catéchèse, ainsi qu’aux fidèles désirant approfondir les questions dites de bioéthique, des informations scientifiques et techniques fondamentales, leur permettant de mieux appréhender les problématiques qui se posent aujourd’hui au niveau de l’éthique et de la morale appliquées aux sciences de la vie et de pouvoir mieux répondre aux questions qui leur sont posées et aux cas de conscience qu’ils rencontreront inévitablement.

Mais avant toute réflexion sur les questions que l’on nomme aujourd’hui « bioéthiques », il importe d’avoir une connaissance de la dignité de l’homme, du don sacré de la vie et de l’objectif orthodoxe de la déification, basée sur l’anthropologie orthodoxe, telle qu’elle est formulée par les Écritures et par les Pères de l’Église.

C’est la raison pour laquelle nous proposons un programme s’échelonnant sur un minimum de deux années et réparti en deux temps.

Une première partie concernera l’anthropologie orthodoxe proprement dite. Celle-ci sera traitée par une série de conférences, dont la liste est jointe à ce document et n’est pas limitative.

La seconde partie concernera les applications des connaissances acquises, aux différentes situations dites bioéthiques, et dont une liste non limitative est aussi jointe à ce document. La deuxième phase sera beaucoup plus interactive et permettra aux auditeurs d’intervenir directement sur le sujet en discussion, puisqu’ils auront reçu pour chaque séance un court document préparatoire les informant précisément des techniques licites ou illicites (à eux d’en juger) utilisées dans le cas étudié.

Programme des conférences d’anthropologie et de sciences de la vie (bioéthique)

Première phase : les grands fondamentaux

I – Introduction. Qu’est ce que l’anthropologie ? Qu’est ce que la bioéthique ? Leur lien.
La notion d’évolution. Le point sur la question. Ce qu’il faut en penser.
L’anthropologie comme discipline des sciences humaines versus l’anthropologie révélée.

II – L’anthropologie selon l’Ancien Testament (anthropologie de la Genèse).
Les fondamentaux.
Trois conceptions anthropologiques différentes entre les trois confessions chrétiennes, selon le    Père Dumitru Staniloae.

III – La question de l’âme, de l’animation et de ses rapports à l’embryon humain, dans la philosophie antique, dans l’AT, les midrash, le Talmud et le Coran.

IV – Le problème du dualisme anthropologique.
Ses sources et ses conséquences.

V – L’anthropologie Néotestamentaire.
Dans les Synoptiques
Anthropologies johannique et paulinienne.

VI – L’anthropologie des Pères.
Tertullien, Irénée, Ephrem le Syrien, les Cappadociens.
Grégoire Palamas.
La Théosis par la pneumatisation.

VII – La fracture anthropologique avec Augustin et sa lecture de la Vulgate. Anthropologie thomiste.

VIII – L’anthropologie hésychaste

IX - Aspects de l’anthropologie du Père Dumitru Staniloae
La cardio-pneumatologie mystique.

X -  Confrontation aux données et avancées scientifiques.
Embryologie et génétique ;  Psychologie et psychanalyse.

XI – Conclusions sur les fondements théologiques de l’éthique orthodoxe.

Deuxième phase :  Les sciences de la vie ou la Bioéthique appliquée

De dérives en dérives sous l’alibi compassionnel (Sur fiches et de manière interactive).

I – La source des problèmes bioéthiques : l’avortement et son apparat juridique.
IVG, interruption thérapeutique de grossesse, interruption médicale de grossesse.

II – La PMA (procréation médicalement assistée). Les différentes méthodes.
Le « projet parental ».

III – Le « génétiquement correct », la manipulation génétique et l’eugénisme.
Le tri génétique.

IV – Le bébé médicament.
DPN (diagnostic prénatal) et DPI (diagnostic préimplantatoire)

V – Les essais thérapeutiques avec des cellules souches embryonnaires.

VI – La mère porteuse et les ventres « en leasing ».

VII – L’utérus artificiel.

VIII – La maladie, le don d’organes.

IX - L’euthanasie.

X – L’incinération – crémation.

Père Jean BOBOC

NOTES:

[1] Cf. Bulletin d’information de l’Ordre national des médecins, numéro spécial nov.-déc. 2010, p. 18.

[2] J. Leonetti, Quand la science transforme l’humain, Plon éd. Paris, 2010, p. 15.

[3] FIV, fécondation in vitro, méthode de PMA (Procréation médicalement assistée) considérée illicite par l’Église catholique, mais acceptée par la plupart des théologiens orthodoxes qui s’expriment sur cette question, aux conditions qu’elle soit homologue (c'est-à-dire à partir des gamètes des parents) et qu’elle ne génère pas d’embryons surnuméraires.

[4] Cf. Père Congar, « Nous sommes devenus des hommes différents. Nous avons le même Dieu, mais nous sommes devant lui des hommes différents et ne pouvons convenir sur la nature du rapport de nous à Lui » dans Chrétiens désunis. Principes pour un ‘’œcuménisme’’ catholique, éd. du Cerf, Paris, 1937, p. 47. 

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